Même si Megaupload est fermé depuis un an et demi, les conséquences de son succès passé continuent à se faire ressentir, mais pas forcément là où on s’y attend le plus. Orange et plusieurs autres grands opérateurs européens sont en effet sous le coup d’une enquête de la Commission Européenne pour abus de position dominante, dont les origines remontent à Megaupload…
En effet, il y a quelques années, face au succès du site, qui engendrait un fort trafic entrant en provenance de l’opérateur de transit Cogent, Orange avait voulu remettre en question son accord de peering avec ce dernier, en lui réclamant une compensation financière pour l’augmentation des capacités de peering.
Le peering gratuit repose en effet sur le fait que les échanges entre opérateurs sont relativement symétriques, ce qui permet aux coûts de s’équilibrer et permet donc de ne rien facturer. Mais le succès de Megaupload a fortement déséquilibré ce trafic : il y avait bien plus de gens qui téléchargeaient sur le site que de gens qui y envoyaient des fichiers. Ainsi, sur le lien entre Cogent et Orange, le trafic était 13 fois supérieur vers Orange que vers Cogent.
Ne voulant pas mettre la main au portefeuille, Cogent avait déposé plainte contre Orange auprès de l’Arcep, mais cette dernière avait donné raison à Orange. Une décision qui avait fait grand bruit à l’époque, car elle autorisait implicitement un opérateur à faire de grosses entorses à la neutralité du net, en favorisant les acteurs ayant les moyens de payer… Pas satisfait de la décision de l’Arcep, Cogent a porté l’affaire devant la Commission Européenne, en ajoutant Deutsche Telekom (Allemagne) et Telefonica (Espagne) à la liste des accusés.
L’enquête de la Commission prend petit à petit forme, et des perquisitions ont été menées cette semaine dans plusieurs locaux des trois opérateurs, à la recherche de preuves d’une distorsion de concurrence.
Les opérateur risquent gros dans cette affaire, les procédures pour abus de position dominante pouvant mener dans l’Union Européenne à des amendes s’élevant à 10% du chiffre d’affaire de la société condamnée. Dans diverses affaires passées, la Commission Européenne à infligé des amendes dépassant le milliard d’euros :
- en 2009, 1.06 milliards d’euros réclamés à Intel pour des pratiques anticoncurrentielles à l’encontre d’AMD,
- en 2012, 6 constructeurs d’écrans cathodiques ont été condamnés à 1.47 milliards d’euros d’amende pour entente sur les prix,
- depuis 2004, Microsoft a écopé de 2.24 milliards d’euros d’amende dans le cadre de 4 condamnations.